Le chanoine Stanislas RONCIN
Ce fut le Chanoine Stanislas RONCIN qui me mit le premier les doigts sur un clavier. Il était alors aumônier du Carmel d’Alençon. Ma mère, qui avait su découvrir mon goût pour la musique, me faisait lui servir la messe. Pour me remercier, il me proposa de m’apprendre l’harmonium. Ce que je fis avec plaisir malgré mes petites jambes. Je garde de lui un souvenir ému et reconnaissant. C’était un saint homme et un très fin musicien. On trouvera quelques-uns de ses cantiques et un recueil de chansons « La gaieté française » sous l’onglet « Partitions gratuites ».
Ceux qui se souviennent de lui sont sans doute peu nombreux. Je remercie vivement le Père Henri Leturcq et Jean Marie Godard de m’avoir transmis quelques éléments d’information. Né à La Chapelle Montligeon en 1873 et décédé à La Chapelle près Sées en 1962, Stanislas Roncin consacra toute sa vie aux autres et en particulier au « peuple » et aux « petits », comme le titre l’un de ses recueils de cantiques. N’oublions pas que l’une de ses chansons « Sois fier ouvrier » devint l’hymne national de la JOC. Pour l’entendre, copiez/collez ce lien dans votre navigateur ou sélectionnez le et faites Ctrl+clic : http://www.youtube.com/watch?v=O4weOW8uSQo Les paroles sont dans le recueil de chansons cité plus haut.
Ordonné prêtre en 1897, il fut d’abord vicaire à St Martin d’Argentan, puis curé à St Germain de Clairefeuille où il rédigea et imprima un bulletin paroissial ‘Le petit semeur ».
En 1910, il fut nommé Chapelain de l’œuvre Expiatoire de Montligeon où il retrouva Mgr Buguet qui avait été le curé de son enfance. Il fit du secrétariat, anima la chorale paroissiale, fonda une société de gymnastique et chercha toujours à distraire et éduquer les jeunes. Une dizaine d’années plus tard, il fut nommé curé de Soligny la Trappe, puis du Sap. Il devint ensuite aumônier du Carmel d’Alençon et après une très grave maladie dont il sortit presque miraculeusement, il entra à la Maison d’Accueil Saint Martin de La Chapelle près Séez en 1958.
Le 7 Juin 1962, il y célébra son jubilé de rubis (65 ans de sacerdoce) en la Chapelle de l’Institut St Joseph sous la présidence de Mgr Pioger. Je dois à l’obligeance des sœurs du Carmel d’Alençon de disposer de l’image souvenir de cet événement et des paroles du cantique composé à cette occasion par le jubilaire.
Le Père Paul QUEINNEC
Même s’il ne me donna pas de « cours particuliers », je dois mentionner ici le Père Paul Queinnec que je connus lorsqu’il était vicaire à Notre Dame d’Alençon. C’est certainement à lui que je dois mes émotions musicales de jeunesse les plus intenses. Me mélangeant peut-être dans les dates, je me souviens en particulier de « Nicolas de Flue » d’Arthur Honegger dont je me fis un plaisir de transcrire quelques chœurs pour l’orgue. Plus tard, c’est au Père Queinnec que je devrai ma découverte de l’orgue baroque français lorsqu’il m’envoya en stage à St Maximin de Provence en 1963, frais pris en charge par le diocèse, et me prêta une soutane pour faire plus facilement le trajet en stop! Retour sur l’enfance avec quelques photos souvenirs.
Et voici les petits chanteurs de Notre Dame d’Alençon. Le petit joufflu que j’étais alors se trouvait toujours au premier rang à cause de sa petite taille.
Mais on ne peut pas évoquer le Père Queinnec, qui mériterait bien d’avoir son propre site, en se limitant à quelques souvenirs d’enfance. Mr Yves Sauvegrain, ancien Directeur de l’Orne Combattante a bien voulu m’autoriser à reproduire l’article qu’il publia sur la vie du Père Queinnec lorsque celui-ci transmit à Bernadette Barré la baguette de la Schola Cantorum.
Le Père Alexandre LETELLIER
Je dois mentionner aussi le Père Alexandre Letellier qui continua à me faire travailler l’harmonium pendant les deux années que je passai au Pré-Séminaire de La Chapelle près Séez. Je garde avec émotion le volume II des Heures Mystiques de Boëllmann dont il me fit cadeau avec mon nom écrit de sa main. Il avait ses « tubes », en particulier de cet auteur, l’Offertoire en sol majeur et le Menuet de la Suite gothique.
Sauf lorsqu’il était en croisière, – il adorait les voyages organisés, je crois, par la Procure et les racontait avec délectation -, il venait toujours aux concerts que je donnai notamment à Tessé la Madeleine. Il aimait beaucoup le Choral de la Cantate 147 de Jean Sébastien Bach « Jésus que ma joie demeure » dont il demanda qu’il soit joué à son inhumation. J’en fis pour lui un arrangement de mon goût que l’on trouvera dans les « Partitions gratuites ».

Toute sa vie fut consacrée à l’éducation et à la formation des jeunes. Je dois au Père Joseph Courteille, « mémoire » des Anciens du Petit Séminaire, le résumé de sa vie. Né à Carentan le 2 Mai 1920, il fut ordonné prêtre le 3 Juin 1944 et nommé au pré Séminaire de La Chapelle près Séez en Septembre 1944. Il muta en 1955 au Petit Séminaire de Séez où je le retrouvai comme professeur en 3ème et comme directeur de conscience. Une promotion méritée le vit arriver au poste de Directeur du Sacré Cœur de Domfront de Juillet 1962 au 1er Septembre 1990, date de sa retraite. Décédé le 16 Janvier 2003 sans que, emménagé à Juvigny sous Andaine fin 2002, j’eus pris le temps d’aller le voir, il fut inhumé à Domfront le 22 Janvier.
Il laisse un ouvrage posthume : « Le personnage du pédagogue dans le théâtre comique du XVe et du XVIe siècle », imprimé à Flers (Mouturat) et disponible à l’évêché de Sées. Sur la dernière page de couverture, on peut lire : « L’imaginaire et la poésie qui, de tout temps ont habité le Domfrontais et les rapports étroits que la ville de Séez a entretenu avec la vie des Collèges et des Séminaires, nous valent cette magnifique galerie de tableaux mettant en scène le Pédant de notre ancienne comédie. L’entreprise est menée avec grande érudition, la sérénité provinciale devant l’affirmation de toute valeur sûre et la force du rire inhérente à toutes retrouvailles avec le Moyen-âge. L’ouvrage s’adresse aux hommes et aux femmes passionnés d’histoire, de littérature et d’anthropologie. »
Monsieur Georges TROUVÉ
Voila le Maître des maîtres, organiste de la Cathédrale de Séez, avec qui je travaillai pendant 9 ans, de Septembre 1955 à Juin 1964.
Au petit séminaire, ce fut d’abord l’harmonium où je succédais à Claude Martin pour l’accompagnement des offices. Le répertoire pour cet instrument était des plus classiques :
- Les « Heures Mystiques » de Boëllmann,
- « L’Organiste » de César Franck,
- « Au pied de l’autel » de Guy Ropartz,
- Les « 24 pièces en style libre » de Louis Vierne,
- Les « 24 pièces modales » de Jean Langlais,
- Les « Préludes liturgiques » de Gaston Litaize …
Il aimait bien aussi qu’on lui fasse découvrir de nouvelles pièces. La collection de « L’organiste liturgique » en publiait régulièrement. Je me rappelle par exemple qu’il avait bien aimé « l’intermezzo » de la Suite de Georges Robert.
Mais les leçons sur l’harmonium pédalier du Maître vinrent rapidement avec les Petits Préludes et Fugues attribués à Bach, ainsi que ses Chorals authentiques du Petit Livre d’Orgue … Élève d’André Marchal, Mr Trouvé s’inscrivait comme lui dans le mouvement néo-classique avec retour partiel à la tradition des 17ème et 18ème siècles. Les deux Messes de François Couperin et les deux Suites de Clérambault figuraient au programme d’études de ses élèves. Je me rappelle avoir souvent, lors des offices importants, tenu le petit orgue de la Cathédrale. Il ne s’agissait que d’accompagner les chants, mais j’en étais bien fier. Pour travailler les morceaux d’orgue, j’avais accès à Séez à l’instrument du grand séminaire et à Alençon aux deux orgues de Notre Dame, surtout celui qui était alors au fond de l’arrière chœur, où j’ai souvent joué des inhumations, mais aussi au grand orgue encore jouable à l’époque.
Je me souviens du jour où j’avais tenu les claviers du grand orgue pour une messe basse du Dimanche soir célébrée par le Père Théon. Je m’étais lancé dans le Choral dorien de Jehan Alain. Il fallait presque que je sois debout sur le pédalier pour arriver à jouer à la fois des pieds et des mains. Mais j’avais à peu près réussi. Après la messe, j’avais eu droit aux félicitations du célébrant. J’étais fier comme « bar tabac ». Le fait qu’un prêtre aussi éminent prenne la peine de m’encourager m’avait ému et profondément marqué. Mr Trouvé me faisait aussi parfois jouer au Grand orgue de la Cathédrale de Séez. C’était évidemment une récompense et un encouragement. Il n’avait pas besoin de moi! (sauf les rares fois où il fallait accompagner un chœur qu’il ne connaissait pas par cœur). Je me souviens très bien par exemple avoir joué lors d’un office « l’Antienne » de l »Hommage à Frescobaldi » de Jean Langlais. Si ma mémoire est bonne, il ne connaissait pas cette pièce, mais l’avait bien appréciée.

Il inscrivait ses meilleurs élèves à l’Institut Jehan Titelouze de Rouen, baptisé ainsi en l’honneur du grand musicien qui tint l’orgue de la Cathédrale de cette ville pendant 45 ans de 1588 à 1633. Cet Institut de Musique Sacrée, créé dans l’orbite de la Maîtrise Saint Evode, délivra des diplômes d’orgue de différents niveaux pendant une vingtaine d’années. Pour en savoir un peu plus sur Mr Trouvé, reportez-vous :
- A la longue interview qu’il avait bien voulu m’accorder sur ses souvenirs en 2001 et qui avait été publiée dans le Bulletin des Amis de l’Orgue de Versailles.
Les « Partitions« , rares chants que j’ai pu retrouver de lui et qu’il n’avait déclarés ni à la SACEM, ni au SECLI, n’ayant en tête que la louange du Seigneur et, en aucune façon, un quelconque profit personnel (beaucoup de soi-disant compositeurs actuels feraient bien d’en prendre de la graine). Figure également dans cet article la reconstitution de la dernière improvisation qu’il donna à l’église Sainte Madeleine de Bagnoles de l’Orne.
Les Académies d’orgue
Les Académies d’orgue furent pour moi une occasion magnifique de découvrir ou de redécouvrir certains aspects de la musique d’orgue. J’y reviendrai plus longuement car la chose peut intéresser les connaisseurs. Mais ce fut pour moi un grand privilège de pouvoir travailler un peu :
- Le baroque français à Saint Maximin de Provence en 1963 avec Pierre Cochereau, René Saorgin et Marcel Prévost
- Jean Sébastien Bach à Saint Donat en 1986 avec Marie Claire Alain.
- A nouveau le baroque français à Saint Bertrand de Comminges en 1987 avec Michel Chapuis et Jean Saint Arroman
- Le baroque italien aux Andelys en 1988 avec Andrea Marcon
- Le baroque nordique à Falaise et Argentan en 1988 et 2005 avec Willem Poot
- L’improvisation à Romainmôtier (CH) en 2004 avec Rudolf Lutz et Emmanuel Le Divellec
- Le baroque espagnol en un cours particulier avec Guy Bovet la même année.
Michel Trique
Je ne peux pas dire que j’ai été l’élève de Michel Trique, organiste de la Cathédrale de Laval. Mais il est indéniable que j’ai travaillé avec lui pendant des heures :
- Tout d’abord pour préparer les œuvres à 2 ou 3 orgues dans lesquelles nous nous sommes produits en maintes occasions – Ses outils de travail favoris étaient le métronome et surtout le chronomètre; il m’a certainement donné le sens d’une grande rigueur que je n’avais sans doute pas assez spontanément.
- Plus particulièrement encore pour apprendre son « Livre d’orgue dans la tradition classique française » qu’il me dédia et me fit jouer pour la première fois à Bagnoles de l’Orne – Un véritable enseignement était ici obligatoire; même si les titres des différentes pièces du Livre indiquent clairement la registration, il est beaucoup de nuances d’interprétation qui ne figurent pas sur la partition.
Merci à ma chère maman qui fut la première à découvrir chez moi une certaine appétence pour les sons harmonieux. Merci à tous ces initiateurs et ces professeurs qui m’ont transmis l’amour de la musique et de l’orgue en particulier.
Mise à jour : mardi 28 août 2012
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